Je croyais aller dîner mais j’ai fini par voyager. Ce soir-là, j’ai goûté au Cameroun… et j’y ai laissé une part de moi. Bienvenue dans mon récit sensoriel entre Ottawa et Douala.

T’es-tu déjà surpris à tomber amoureux.se à la première rencontre? Tu sais… ce genre de coup de foudre qui te cueille sans prévenir. A love at first « bite », comme on dit en bon français.
Moi, je ne savais pas que ce soir-là, j’allais capoter. Pas pour une silhouette dans la lumière tamisée.
Ni pour un regard qui frôle et déroute. Non, ce soir-là, j’ai craqué pour quelque chose de bien plus inattendu.
Elle était chaude. Intense. Un brin amère, mais dans le genre qui reste en bouche, comme un baiser qu’on n’oublie pas. Une trace qui colle aux souvenirs et au palais. Elle est arrivée sans prétention dans une assiette fumante. Accompagnée de manioc bien roulé, ou plutôt, de miondo, comme on l’appelle là-bas. Ce soir-là, j’ai goûté au Ndolè. Et j’y ai laissé mon cœur. (Et ma fourchette, quelque part entre deux bouchées.)
Ce que j’ai goûté ce soir-là
C’était une carte postale du Cameroun, envoyée directement dans mes papilles. Un aller simple vers Douala sans escale, assis sur une chaise en bois dans un salon bien canadien.
Le Ndolè, m’a-t-on expliqué, est un monument. Un symbole. Une fierté nationale. Classé 47e meilleure cuisine au monde, ce mets-là ne nourrit pas seulement l’estomac. Il raconte une histoire d’amertume apprivoisée, grâce aux feuilles lavées, relavées, massées comme pour calmer un caractère bien trempé. Une histoire de patience. De précision. D’amour mijoté sur plusieurs générations.
Et moi, au bout de quelques bouchées, j’ai cessé toute résistance. J’ai laissé tomber les couverts. Oui, j’ai mangé avec les mains. Parce que parfois, pour savourer un plat, il faut renouer avec l’instinct. Se délester de la bienséance pour mieux s’ancrer dans la vérité. Manger avec les doigts, c’est entrer en contact direct avec ce qu’on reçoit. C’est un rituel. Un hommage. Un retour à la source.
Et le comble?
Pendant que je m’enfonçais dans ce bonheur gustatif, mon hôte, elle, me racontait la recette, les variantes, les secrets du feu doux. Le Ndolè devenait alors une conférence de savoirs, une leçon de géopolitique culinaire. Un masterclass improvisé. Une université dans une assiette.
Et maintenant ?
Maintenant que j’ai goûté au Cameroun, je me sens investi d’une mission sacrée : goûter à tout ce que j’ai raté jusque-là.
Prochaine escale? L’attiéké.
Si une Ivoirienne me lit en ce moment: c’est à ton tour de m’inviter.
Je viendrai avec de l’amour… et un bol fumant de soupe joumou.
Parce qu’entre le manioc et la liberté, il n’y a qu’un pas.
Et j’ai bien l’intention de le franchir.